vendredi 1 juillet 2016

LA BATAILLE DE LA SOMME COMMENCE ! 1er JUILLET 1916


La bataille de la Somme

1er juillet 1916 – 18 novembre 1916

La Bataille de la Somme désigne une confrontation opposant les Britanniques et les Français aux Allemands en 1916, dans le nord de la France, lors de la Première Guerre mondiale.

Le mémorial franco-britannique de Thiepval (2008)


Sommet du mémorial avec les deux drapeaux.



Ce fut la première offensive conjointe franco-anglaise de la Grande Guerre. Les forces britanniques, avec deux armées fortes de 750 000 hommes dont 125 000 pour la première vague d'assaut, lancèrent là leur première opération d’envergure, alors qu'elles jouaient jusqu'alors un rôle secondaire, et tentèrent avec les troupes françaises de percer les lignes allemandes fortifiées. 

Cette bataille avait été planifiée par les Alliés dès la fin de 1915 à Chantilly. La Somme avait été choisie comme lieu de l'offensive en raison de son terrain plat. Les Français devaient jouer le rôle principal dans cette bataille,  avec un soutien des Anglais mais l'offensive allemande sur Verdun, à partir du 21 février 1916, et l'envoi de renforts sur ce secteur, modifia la répartition des rôles: les Anglais devaient désormais faire l'effort principal avec un soutien français.



Carte des opérations par Raymond Recouly, Histoire de la Grande Guerre 1914 1918.




Le Tommy anglais et le Poilu français (Musée de la chapelle de Rancourt-Bouchavesnes)



L'armée anglaise fit un énorme effort de logistique en construisant des routes, des voies ferrées, des positions d'artillerie pour préparer l'offensive. Ses unités étaient composées des "Pals Battalions", des régiments de volontaires regroupant depuis août 1914 des "amis" qui voulaient combattre ensemble, ainsi que de nouvelles unités formées de conscrits, le service militaire ayant été établi en janvier et mai 1916 pour les hommes de 18 à 40 ans.



Soldats écossais montant en ligne.



Le 1er juillet 1916, après une semaine de forts bombardements, Anglais et Français passent à l'attaque à partir de 7 h 30 du matin après l'explosion de mines gigantesques placées sous les tranchées allemandes. 




Une mine anglaise explose dans la Somme le 1er juillet 1916


Le 1er jour de l'offensive, on ne compte pas moins de 60.000 pertes du côté britannique, dont 20.000 tués. Des régiments entiers ont été anéantis comme le Royal Newfoundland Regiment, constitué de 780 hommes, dont 90 % furent mis hors-de-combat en 30 minutes à Beaumont-Hamel... Il ne resta que 68 soldats de Terre-Neuve pour répondre à l'appel le lendemain... Le 11ème Bataillon du Cambridgeshire perdit dans la journée 691 hommes sur 750 ! Les Allemands essuient de leur côté seulement 2000 pertes ce jour même...


Lochnagar Crater à Ovillers-la-Boisselle, cratère laissé par une mine anglaise de 27 tonnes



Artillerie lourde française dans la Somme (collection particulière)


Au soir du 1er juillet 1916, il apparaît clairement que l'attaque est un échec. C’est l’une des journées les plus tragiques de toute l’histoire de la nation anglaise. Les troupes britanniques ont piétiné au nord, dans le secteur de Thiepval et de Beaumont-Hamel, bloquées par la Schwaben Redoubt, une position fortifiée des Allemands, mais elles ont un peu progressé au sud, vers Mametz et Montauban grâce au soutien de l'artillerie française.




Tranchées canadiennes et terre-neuviennes à Beaumont-Hamel (2008)


Une tranchée à Beaumont-Hamel (2008)


L'arbre du danger, qui marquait la première ligne britannique à Beaumont-Hamel le 1er juillet 1916. On aperçoit dans le fond à gauche la statue du soldat écossais qui indique l'emplacement de la première ligne allemande atteinte le 13 novembre 1916.

Pourquoi cet échec des Anglais ?

Le général Haig avait fait plusieurs erreurs:

- il surestima la puissance de l’artillerie : les obus anglais étaient de mauvaise qualité et insuffisants pour détruire les abris allemands, notamment avec des obus à shrapnel censés couper les barbelés.

- les abris des Allemands, dissimulés dans les plis du terrain ou sur les crêtes, étaient très profonds et renforcés par du béton, ainsi ils ne furent pas dévastés par le bombardement. Les barbelés ne furent pas endommagés par le shrapnel.

- les soldats anglais avancèrent trop lentement, au pas, alourdis par de gros sacs et ne devant pas se précipiter sur les Allemands car l'Etat-Major pensait qu'ils se perdraient dans le No Man's Land ! Ils furent aisément abattus par les mitrailleuses allemandes.

- faute de radio ou de téléphone, il était difficile de savoir ce qui se passait sur la ligne de front et les généraux anglais, fautes de nouvelles, ne donnèrent pas de nouveaux ordres. 



Le général Douglas Haig (à gauche) et Sir Pertab Singh of Idar, commandant l'armée indienne en France (à droite).


Il fut beaucoup reproché au général Haig d'être responsable des lourdes pertes de l'armée anglaise, sans ressentir aucun remords ou culpabilité, mais ce général estimait qu'il devait remporter la victoire à tout prix, et que des pertes étaient inévitables lors d'une bataille ! Sa sensibilité était très différente de la nôtre ...


La VIème armée française du général Fayolle,  quant à elle, a bien enfoncé les lignes allemandes, montrant que les Français sont capables d'attaquer malgré la bataille de Verdun. En effet, les Français avaient des troupes expérimentées et une puissante artillerie, bien utilisée, qui a littéralement nivelé les tranchées allemandes en combinant canons lourds et artillerie de tranchée (avec les fameux "crapouillots"). Mais les Français doivent assez vite s'arrêter car les Anglais sont stoppés et les Allemands pourraient attaquer sur les flancs ...










Attaque de Chilly dans la Somme, par les Français, le 4 septembre 1916. Vue générale et deux détails de la photo où l'on voit les soldats dans les fumées des explosions. Collection particulière.



L'offensive va se poursuivre envers et contre tout jusqu'au 18 novembre 1916, date de l'arrêt des opérations en raison du mauvais temps et de la pluie qui avaient transformé le champ de bataille en gigantesque bourbier, empêchant ainsi les mouvements des troupes et de l'artillerie. 



Quelques vues du champ de bataille


Le Bois Browning le 9 août 1916. Collection particulière.


Repérage des canons allemands situés à Fonches. 7 octobre 1916. Collection particulière.


Bouchavesnes le 27 septembre 1916. Collection particulière.


Le village de Beuvraignes sous la neige, le 24 janvier 1917, avec un impressionnant réseau de tranchées. On remarquera les cratères de mines en bas à gauche de la photo. Collection particulière



Photo aérienne de Crapeaumesnil le 24 janvier 1917, avec un réseau dense de tranchées. Collection particulière.


Bois de Crapeaumesnil le 27 janvier 1917. Collection particulière.



Après le 1er juillet et l'échec de la percée attendue ("the Big Push"), l'offensive se transforma en une série d'opérations locales destinées à arracher aux Allemands leurs positions fortifiées. Les combats furent très féroces et sanglants: les Français arrivent sur la ligne Bouchavesnes - Sailly-Saillisel le 25 septembre 1916 mais sont bloqués par les contre-attaques des Allemands qui se sont ressaisis; les Australiens prennent Pozières le 7 août au prix d'énormes pertes; les Irlandais finissent par prendre en totalité Thiepval et la Schwaben Redoubt les 26-28 septembre tandis que les Ecossais s'emparent de Beaumont-Hamel le 13 novembre 1916. 





La chapelle de Bouchavesnes et le cimetière militaire (2008)


Les Alliés obtiendront lors de cette bataille un gain plutôt dérisoire de 10 km; gain finalement perdu en 1918 lors des grandes offensives allemandes. Le prix en est exorbitant au regard des pertes : 

- 420 000 Britanniques tués et blessés ou disparus ainsi que   
- 203 000 Français (dont 67 000 tués) et
- 437 000 Allemands (au minimum; 500 000 selon l'estimation haute, dont 170 000 tués)... 



Tombe du soldat Chapman tué le 1er juillet 1916 (Thiepval)


Tombe d'un soldat anglais inconnu (Thiepval)



Tombe du soldat Ladjal Belkaeira (1er Régiment de Tirailleurs Marocains) mort pour la France le 12 septembre 1916 (cimetière de Bouchavesnes)


Tombe du soldat Bernardin Mougneres (135è RI) mort pour la France le 12 octobre 1916 (cimetière de Bouchavesnes)


Tombe du soldat Jacob Mimouni (135è RI) mort pour la France le 10 octobre 1916 (cimetière de Bouchavesnes)



La Somme fut une bataille très meurtrière avec des pertes supérieures (plus de 1 000 000 de victimes dont 443 000 tués) à celles de la bataille de Verdun qui a pourtant duré plus longtemps (700 000 victimes dont 300 000 morts du 21 février au 15 décembre 1916).  



Quelques portraits des disparus de la Somme (Mémorial de Thiepval)



Sterbebild du sous-officier allemand Alois Baumann, 11ème régiment d'infanterie, tué dans la Somme le 19 juillet 1916 à l'âge de 22 ans (collection particulière).



Carte comportant les citations attribuées au caporal-clairon Henri-Alexis Brion, du 46ème Régiment d'Infanterie, tué à Bouchavesnes le 25 septembre 1916, avec sa croix de guerre collée au verso et une annotation de son oncle J. Rollinat (de Charbuy dans l'Yonne): "en souvenir de mon cher grand neveu. J. Rollinat 30 nov. 1916" (Collection particulière)




La Somme fut aussi une bataille très cosmopolite avec 20 nationalités, venues surtout des empires coloniaux, qui se sont affrontées.  Les Britanniques ont par exemple envoyé au combat des Sud-Africains, des Canadiens, des Terre-Neuviens, des Néo-Zélandais, des Indiens, des Irlandais, des Ecossais, des Australiens et les Français ont utilisé leurs troupes coloniales venues d'Afrique. 



Le mémorial australien de Pozières (2008)


Détail du monument australien de Pozières



Le parc-mémorial terre-neuvien de Beaumont-Hamel (2008)


Le caribou canadien



Vue du champ de bataille à Beaumont-Hamel (2008)



Le terrain bouleversé à Beaumont-Hamel (2008)



Un poppy avec le drapeau canadien à Beaumont-Hamel


La cavalerie indienne dans la Somme.




La Bataille de la Somme vit aussi l'utilisation, pour la première fois dans l'Histoire, du char d'assaut appelé "Tank" par les Anglais, le 15 septembre 1916 à Flers-Courcelette. Ces chars (Mark I) étaient peu nombreux et peu fiables mécaniquement mais ils permirent aux Anglais de prendre Thiepval les 26-28 septembre 1916. 



Char anglais de la Grande Guerre. La photo a été prise dans la Somme mais en 1918, lors de la seconde bataille, et le "tank" a été récupéré par les Allemands comme le montre la croix de fer peinte sur le blindage, et utilisé contre les Anglais qui l'ont détruit ! Collection particulière.


La bataille est considérée par certains historiens comme un échec sanglant des Alliés. Pourtant, cette bataille peut être vue sous différents angles:

- Cette bataille montra aux Allemands que la puissance de feu avait changé de camp et que Anglais et Français poursuivaient la guerre avec vigueur. Au printemps 1917, les Allemands décidèrent donc de reculer afin de rétrécir leurs lignes et de compenser ainsi leurs pertes (ce fut l'opération Alberich en février 1917). Ce recul notable fut marqué par la destruction systématique de tous les villages par les Allemands, selon la tactique de la terre brûlée.









Quatre vues de Beuvraignes, dans la Somme, le 27 mars 1917 avec des soldats français qui visitent le village totalement anéanti. Collection particulière.


- Cette bataille, malgré ce recul, est aussi considérée comme une victoire défensive des Allemands car leurs lignes ne furent pas percées malgré l'ampleur des moyens utilisés par les Alliés.

- Les Allemands envisagèrent aussi de reprendre la guerre sous-marine à outrance, en février 1917, pour tenter de reprendre l'initiative stratégique, ce qui entraîna l'entrée en guerre des Etats-Unis en avril 1917. 

- La bataille de la Somme obligea surtout les Allemands à arrêter leur offensive sur Verdun et à retirer de nombreuses troupes de ce secteur, favorisant ainsi la victoire française. 

- Enfin, même si cela est cruel à dire en raison des lourdes pertes subies, l'armée anglaise put perfectionner ses tactiques, avec l'emploi combiné de l'infanterie, des tanks, de l'aviation et de l'artillerie ("the all-arms warfare"), ce qui lui permit de remporter des succès à Cambrai en 1917 puis de remporter la victoire dans le Nord de la France dans les trois derniers mois de 1918 ("the Hundred Days").

Monica Crefcoeur et Léa Schillot (Seconde 3)

Bibliographie:



- Raymond Recouly, Histoire de la Grande Guerre 1914 1918, Les éditions de France, 1934.
- John Buchan, La bataille de la Somme, 1917.
- Julian Thompson, The 1916 experience, Verdun - La Somme, IWM, 2006.



Le récit du lieutenant-colonel Udalric Viet, qui a combattu au sein du 4ème BCP dans la Somme, a été retranscrit par la classe de 1ère L/ES (603) en 2014-2015 (pages 38 à 46) et est consultable sur:

http://carnet-udaric-viet.blogspot.fr/